mardi 4 mai 2010

Poétique du haïku



1-Respectez l’esprit du haïku selon l’école de Bashô
Le haïku respire la légèreté. 
Ne pas penser, juger, tenter d’expliquer, … comme un Occidental
Le haïku se doit d’être cocasse, drôle, humoristique, 
… autant que possible
Le haïku doit avoir une âme et doit faire passer autant d’émotion que possible


2-Respectez les contraintes de forme – vous y gagnerez en créativité
Respectez strictement la métrique des vers en 3 séquences de 5-7-5 syllabes
On peut tolérer des souplesses dans 2 cas : possible ou érable (2 ou 3), violon (2 ou 3)
On peut accepter exceptionnellement 16 ou 18 syllabes à condition que cela crée un vrai plus
3-Ne faites surtout pas rimer vos séquences
Ce serait de très mauvais goût
4-Donnez à vos haïku un ton émotionnel
Faire passer l’admiration, l’émerveillement ou accentuer une souffrance (ya)
Le ya se traduit par ah ! oh ! ou ! seul à la fin des2 premières syllabes
Faire passer une pause dans le texte ou la suspension de la parole à la fin du poème (kana)
Le kana se traduit par un tiret (expression introvertie) ou des points de suspension
Le tiret permet de traduire d’autres émotions : chagrin, surprise, déception, peur, menace
Parfum de lilas – / Le regard de l’amie / Prête à s’en aller
Les autres au boulot / Je sors de ma sieste – Oh ! / C’est déjà demain.
5-Prêtez la plus grande attention à la ponctuation
N’existe pas en Japonais. Ne pas s’en priver.
6-Créez des images avec des mots
Un haïku est une image, une peinture, une scène vivante, une mise en scène
Donner à voir cette image, sans penser, sans interpréter et surtout sans analyser
Le lecteur doit être capable de peindre la scène à partir de votre description
Appeler un chat un chat, un chêne plutôt qu'un arbre, ...
Derrière les carreaux / Dans la chaleur du café / Deux joueurs d’échecs
Mais un haïku peut aussi être une image littéraire : métaphore, …
Ma Venise toi / Va ! Essuie ton rouge et viens / En masque de brume
7-Utilisez toujours un langage simple
La pluie d’hiver / tombe sur l’étable - / un coq chante
Ne possédant rien / Comme mon cœur est léger / Comme l’air est frais
8-Prêtez attention à l’ordre des mots
Les bateaux noirs étrangers / Dans la Mer de Seto ont pénétré / Pics dans les nuages
9-Réduisez vos séquences à l’essentiel
Deux procédés : la parataxe et l’ellipse
Parataxe : élimination systématique des prépositions, conjonctions, etc. qui servent de liant : et, quand, que fait, etc.
Ellipse : suppression des mots qui seraient nécessaires à la plénitude de la construction, mais dont l’absence ne gêne pas la compréhension du texte : verbes, articles, etc.
On note qu'une simple suppression créant une incorrection grammaticale suffit à donner à une séquence un parfum poétique. La faute élève le texte !
Vieille mare - / Une grenouille plonge / Bruit de l’eau
Loin du bruit des masques / Dans les rues parfum de Chine / Le silence est gris
10-Éliminez les verbes au profit des groupes nominaux
Forme de l’ellipse’
Le marais, moite / Le silence blême et lourd / Soudain un canard ! …
Un chat dans un lit / Un orgue de barbarie / Saint-Germain-des-Prés
11-Choisissez bien le temps de vos verbes
Utiliser plutôt l’infinitif que l’indicatif.
Utiliser le participe présent au lieu de l’indicatif. Jouant, rêvassant, buvant, etc.
Mes pas sous la pluie / Nuit de béton nuit d’acier - Vivre ici, toujours ? …
Jouant au volant / Innocentes / Elles écartent les jambes
12-Faîtes jouer le premier rôle à l’adverbe ou à la locution adverbiale
L’un et l’autre permettent de condenser une idée à sa plus simple expression, donc de la réduire à l’essentiel. L’adverbe peut remplacer le verbe.
Adverbes : absolument, tristement, patiemment, etc.
Adverbes : comme, tout, même, toujours, déjà, aussitôt, soudain, peu, très, trop, etc.
Locutions adverbiales : tout à coup, à l’endroit, à l’envers, etc.
Ils détiennent un fort potentiel de charge émotionnelle, de puissance poétique.
Encore aujourd’hui / Comme une larve je vis / Et demain encore
Tout est neige grise / Tout est silence tout est brume / Et ce chien qui hurle …
13-Évoquez ce qui n'existe pas
Utilisez des pronoms indéfinis : rien, pas un, personne, … ou encore l’adjectif indéfini nul (nulle), qui sont chargés plus encore de puissance poétique que l’adverbe.
Pas une feuille ne bouge / Comme il est effrayant / Le bois l’été !
Nulle âme silence … / Pas un souffle de vie, rien ! / Comme au premier jour
14-Utilisez les connotations d’un mot
La connotation est ce à quoi le mot fait penser, ce qu’il évoque chez le lecteur en plus de sa signification propre. Le noir connote la mort, le blanc connote la pureté, la virginité, le printemps connote la jeunesse, la vigueur, l’enthousiasme, la joie, …
Vent d’automne / Les fleurs rouges / Qu’elle aimait arracher
Farce du destin / Dans le casque chante / Un grillon